Avec une telle gauche, la droite a de beaux jours devant elle
Et si on disait que la gauche française et peut-être même européenne s’était laissé phagocyter par une nouvelle droite qui a su renouveler son idéologie tout en restant fidèle à ses fondamentaux ?
Finalement, la gauche progressiste française a vécu une renaissance sur les bases du combat gagné contre les fascismes européens au sortir de la deuxième guerre mondiale. Ses idéaux de justice et de progrès social, son refus de toute atteinte aux libertés collectives et individuelles en faisait le champion du peuple face aux supporters d’un capitalisme débridé, face aux bourgeois pleins de mépris vis-à-vis des masses populaires et laborieuses, aux partisans d’un ordre social basé sur des valeurs morales nationalistes voire religieuses. Le peuple pardonnait même à cette gauche-là ses errances militaires colonialistes des années 1945-1960 ou son néocolonialisme à l’époque de Mitterrand.
Mais là, la droite est-elle vraiment identique à ce qu’elle était il y a 60 ans ?
La droite a considérablement changé, elle a abandonné ses vieilles lubies de domination conquérante quand la France avait un empire colonial et une sphère d’influence jalousement gardée. Elle apparait un peu plus ouverte, elle a ses jeunes et ses petites gens. Elle peut même se permettre la xénophobie d'état et du racisme à petites doses sous le prétexte qu'elle se pare des habits de la lutte contre l'antisémisme..
La droite a fait du social à sa façon, elle prétend aujourd’hui rétablir les équilibres sociaux et économiques en argumentant sur les abus de la redistribution des richesses, sur les excès de l’état providence, sur les lourdeurs de bureaucratie, sur le tabou de l’envie de faire du profit, de gagner de l’argent et de réussir dans les affaires. Elle sermonne de la même façon contre les 35 heures, les chômeurs, les fraudeurs, les clandestins, les immigrés. Des boucs-émissaires bien commodes pour justifier l'état actuel dela France.
La droite s’est ainsi américanisée. Finies les rivalités avec les autres pays européens, fini le patriotisme économique, mais, à terme, le credo est aussi d’en finir avec des syndicats trop puissants, d’en finir avec les idées communistes, libertaires et anarchistes, d’en finir avec l’état providence, d’en finir avec les budgets sociaux, d’en finir avec l’impression de paresse générale que donnent les travailleurs salariés quand ils parlent de temps de travail.
Aux USA, pas de parti communiste, trostkiste, anarchiste. Aux USA, pas de manifestations, de grèves qui bloquent la circulation et l’économie. Aux USA, priorité à la sécurité, à la paranoïa collective contre un ennemi à abattre coûte que coûte comme le rabâchent films et séries télévisées.
Aux USA, le héros est soit un flic, soit un militaire. On aime les chiens de garde, là-bas. Même si on a le droit constitutionnel de faire tout ce que n’interdit pas la loi.
Et la gauche ?
La gauche française sociale démocrate (PS et apparentés) convulse de crises épileptiques en tétanies à cause de sa métamorphose d’un parti socialiste en un parti démocrate à l’américaine. Le parti socialiste, en ce moment, c’est Dr Jekyll en train de se tordre de douleur d’avoir ingéré sa potion qui doit le transformer en Mr Hyde.
On parle de guerre des chefs, de rivalités claniques, d’alliances signées puis trahies le jour même mais cet épiphénomène ne doit pas nous masquer la réalité d’un parti en vacance d’idées.
Car, ce qu’on attend du parti socialiste est qu’il trouve de quoi affronter les filiales européennes et françaises de la droite américaine. Or, il croit encore qu’il bataille contre le parti qui a succédé au vieux RPR bien franchouillard de Chirac… Sarkozy est le directeur pour la France de la droite américaine. Son but, faire gagner des part de marché à l’idéologie néoconservatrice mais sans le dire trop fort puisqu’il use de méthodes à connotation patriotique franco-française. Et puis, l'outrance américaine, c'est bling-bling !
L’avenir ne sera pas tout rose, des ministres de gauche dans un gouvernement de droite, il y en aura d’autres. Le vrai combat se déroulera entre une gauche radicale et une droite élargie jusqu’à des socialistes de plus en plus lâches. Car, à terme, avec des syndicats trop faibles, un parti socialiste timoré, les petites gens oseront des luttes très dures qui finiront forcément mal à cause de leur esseulement. La révolte des banlieues en a été l’avertissement. Le fait qu’elle soit le fait de jeunes issus de l’immigration pour une bonne part n'a pas mobilisé au delà des cités mais montre, à la façon des ouragans chaque année de plus en plus dévastateurs, que les crises futures se dérouleront dans la sueur et les larmes, dans la violence et le sang.