Protéger Ayaan Hirsi Ali oui, l'instrumentaliser non !
J’ai de la sympathie pour Ayaan Hirsi Ali.
J’en ai moins pour ceux qui l’instrumentalisent afin de laisser entendre que le seul combat qui vaille d’être mené aujourd’hui serait celui d’empêcher l’Islam de devenir maître du monde, de sous-entendre qu’il constitue réellement une menace. La république a ses règles de laïcité et de droit d'asile, qu’elle les applique sans chercher à en tirer gloire.
Oui, il faut protéger cette femme de ceux qui lui veulent du mal. Il y a le précédent de Théo Van Gogh avec qui elle avait travaillé, il ne doit pas y avoir d’autre harcèlement, d’autres menaces, d’autre meurtre.
On dit qu’elle a menti. Peut-être parce que cela lui permettait plus facilement de se mettre à l’abri, c’est du moins ce que je suis prêt à croire. Je ne crierai pas avec ceux qui estiment que les menaces à son encontre pourraient être exagérées. Je ne hurlerai pas contre son engagement à la droite de la droite aux Pays-Bas car elle avait tenté de travailler pour le parti travailliste avant de s’en voir exclue. Elle n’est pas Redecker qui n’avait fait qu’un petit article minable et mal argumenté, elle est une femme qui a vécu l’oppression puis l’inquisition religieuse très tôt dans sa chair et son esprit.
Ce qui est drôle dans cette histoire, c’est de voir des intellectuels se précipiter sur une cause à défendre et la médiatiser comme si c’était la seule possibilité pour qu’elle ait droit de citer.
Le problème est qu’ils se sont fourvoyés souvent en choisissant soigneusement leur indignation de façon à faire consensus et à en tirer un bénéfice pour eux-mêmes. Voilà en quoi il y a une instrumentalisation . J’aurais aimé par exemple une mobilisation comparable lorsque les USA ont légalisé la torture il y a quelques jours. J’aurais aimé une mobilisation comparable pour la liberté d’expression de Dieudonné.
J’aurais aimé une mobilisation comparable pour Kemi Seba, pour les palestiniens, pour Gaza devenu camp où l’on concentre arbitrairement des combattants et des populations civiles.
Hypocrisie du politiquement correct, indignation sélective. A force de désinformation et de contorsions des idées, des gens interpellent des sous-ministres à propos d’une femme de courage mais malgré passent sous silence les visées hégémoniques et totalitaires de la politique américaine où se devinent des arguments messianiques, sous prétexte que ses victimes ne seraient que des enragés illuminés et fanatisés, ce qui revient à dire : Torturons, c’est pour le bien de l’humanité, c’est au nom des droits de l’homme et de notre protection.
Utiliser les principes d’humanité ainsi, c’est comme utiliser la flamme d’une bougie pour brûler des ombres autour de soi alors qu’elle était seulement destinée à éclairer. Le résultat est que les ombres se multiplient au fur et à mesure que le feu se propage… Et ainsi la peur devient notre compagne.
Les Philippe Val, BHL, Finkielkraut, Caroline Fourrest se sont érigés en défenseur d’acquis de civilisation. On ne sait plus vraiment ce qu’ils défendent. Je vois une nostalgie d’une Amérique idéalisée en 1968, l’illusion d’un combat universel où se mêlent philosophie libertaire et progrès matériel.
Leur ego surdimensionné les a rendu autistes en fait, une surdité sélective leur tient lieu de pensée ; elle les rend même sourds à leurs propres contradictions. Ce poison qui leur fait confondre Chavez avec Staline ou Dieudonné avec Doriot, juste par calcul, leur est monté à la tête, ils se prennent pour des Voltaire qui lui-même n’en était pas à une contradiction près. Celui-ci avait au moins comme excuse d’être bien moins informé qu’ils ne le sont.
La France s’honorera de défendre Ayaan Hirsi Ali mais rappelons cette évidence à ceux qui prétendent tout connaître et, au fond d’eux, méprisent le peuple trop vulgaire à leurs yeux :
La défense des principes ne doit souffrir d’aucun calcul politique ou partisan car il en va de leur vérité.
La défense des principes ne doit souffrir d’aucun calcul politique ou partisan car il en va de leur vérité.