Comme un manouche sans mercedes
Nous sommes vraiment admirablement gouvernés.
Hier, avoir convoqué la fine fleur du gouvernement, Sarkozy, président de la république a fait annoncer par son ministre de l'intérieur une mesure phare.
L'état va contrôler la situation fiscale des gitans parce que certains d'entre eux ont été aperçus avec de grosses mercedes pour tirer leur caravane.
Dix contrôleurs des impôts vont s'y consacrer. Et, ils vont devoir se nomadiser d'une certaine façon. Leur première destination? Les Saintes-Marie-de-la-mer peut-être!
Franchement, c'est à se demander si on n'est pas dans un sketch grandeur nature de Dieudonné!
Au moment où Eric Woerth peine à se justifier de la légalité de ses actions de trésorier de l'UMP et de ministre du budget dans l'affaire Bettencourt, au moment où l'on apprend qu'une bonne partie du gratin des grandes fortunes cherche par tous les moyens à échapper au fisc grâce à des moyens plus ou moins légaux, on s'en prend aux gitans qui roulent en mercedes et autres voitures de grosse cylindrée.
Ils sont gitans et ils ont des mercedes, alors ils sont coupables de fraude car ils ont bien la tête à ça! Pas comme Woerth qui affirme qu'il n'a pas la tête à couvrir des évasions fiscales!
Présomption d'innocence?
Oublierait-on que les gitans et autres gens du voyage travaillent? Quand on ne veut pas connaître, c'est qu'on a dû naître con!
Les gens du voyage sont souvent des forains, des travailleurs agricoles saisonniers, des gens du cirque, des revendeurs sur les marchés. Certains ont des petites entreprises et comme beaucoup de gens, ils ont droit au crédit bancaire pour acheter ce que bon leur semble. En plus, tous ne sont pas nomades "à plein temps". Beaucoup sont sédentaires une partie de l'année et travaillent comme tout le monde.
Une grosse mercedes? Achetée neuve ou d'occasion? Achetée cash après des années d'économie ou à crédit?
Les politiciens zélés ne se posent pas ce genre de question, ils montrent du doigt, accusent et envoient la boue de la honte sur des gens pas assez puissants pour se défendre. Avec cette tendance à formater l'opinion et à désigner des coupables par commodité, on en viendrait même à imaginer ce que serait la vie des juifs de France s'ils ne s'étaient pas organisés en organisations puissantes et influentes.
La vérité est qu'on reproche aux gens du voyage d'être des consommateurs de liberté au lieu d'être des consommateurs tout court.
La vérité est que les gens du voyage ont mis en place un système de solidarité familiale et clanique qui échappe à tout contrôle. Moi, je dis tant mieux!
La vérité, est que ce système qui permet que l'un des membres du clan puisse recevoir des autres pour s'acheter quelque chose de coûteux.
Dans ce système, on aide, on emprunte et on prête, on se rend service, on met du fric en commun, on se porte caution solidaire pour un crédit bancaire, on se refile les bonnes adresses.
Tout le contraire de la société actuelle qui voit ses familles se disloquer et exacerbe l'individualisme.
D'où le maintien, pour les gens du voyage, de leurs carnets individuels de circulation obligatoire. Comme les laissez-passer pour les habitants des townships de l'Afrique du Sud pendant l'apartheid.
Le climat est à la délation encouragée par le sommet de l'état. C'est évident. Une sorte de facisme soft pour séduire les électeurs les plus à droite. Moi fasciste, nooon!
Il suffit de ne pas le dire, de déguiser cela sous des oripeaux républicains de nécessités sécuritaires pour tous et personne ne s'en aperçoit. On flatte les délateurs, ceux qui observent, épient et tirent leurs conclusions obtues.
Comme dans le sketch "Cohen et Bokassa" d'Elie et Dieudonné: " Déjà qu'on a l'bruit et les odeurs, enfin j'me comprend!".
Les fascistes en herbe ne vous diront jamais qu'ils sont fascistes. Leurs idées tiennent en quelques truismes simples parfaitement caricaturées dans le sketch de Luis Rego : la journée d'un fasciste sur France-Inter en 1983, en présence de Jean-Marie Le Pen.
Voici le verbatim d'un extrait très révélateur et tout à fait dans l'air de notre époque:
Et qu'est-ce que vous croyez, amis de la tolérance? Que nous sommes plus à cran que les autres? C'est faux! Nous sommes aussi énervés que les autres!
Face aux injustices et au laisser-aller, au manque de respect et de responsabiluéts de nos dirigeants, savez-vous au moins ce que nous voulons? Je vais vous le dire.
Une société parfaite!
Une société parfaite, amis libéraux, écoutez-moi bien, c'est une société où les chiens font où on leur dit de faire!
Où il n'y a pas de grève, où les partis politiques ne viennent pas nous beurrer la raie à la télé, où les travailleurs immigrés sont là pour travailler et non pas pour se goinfrer de couscous et de morue,
où le terrorisme doit être interdit, où les riches doivent être contents d'être riches et les pauvres contents d'être pauvres, où tout le monde doit être unis contre tous les autres,
où l'oncle doit être marié avec la tante!
Une société parfaire est une société où l'on ne rit pas bêtement!
Mais à trop rire, on en oublierait certaines choses sur les gitans, les bohémiens et autres manouches:
On ignore ou on ne veut pas connaître qu'ils figuraient aux côtés des juifs comme peuple de profiteurs dans l'idéologie raciale nazie.
Nomades, sans attache à une terre ou une nation, avec une réputation de voleurs, de violeurs, de kidnappeurs...
Bref, des fourbes auxquels on ne peut se fier et sans identité nationale... Comme les juifs.
On ignore ou on ne veut pas connaître qu'un quart des gitans et des tsiganes d'Europe ont été exterminés dans les camps de concentration nazis (entre 250.000 et 500.000 morts),
On ignore ou on ne veut pas connaître que la France de Vichy les maintenait dans des camps d'internement (une quarantaine).
La plupart des stèles rendant hommage aux déportés ne les mentionne pas...
On ignore ou on ne veut pas connaître que, de 1912 à 1969, ils devaient avoir sur eux, un carnet anthropométrique comprenant les empreintes digitales de leurs dix doigts, leurs photos de face et de profil, leur type de faciès.
Aujourd'hui, il s'agit d'un carnet de circulation à faire viser dans une gendarmerie tous les six mois.
On ignore ou on ne veut pas connaître qu'aujourd'hui, le droit de vote leur est refusé s'ils ne peuvent prouver une résidence permanente dans une commune depuis plus de trois ans!
Et tout ce qui intéresse les dirigeants français, c'est leurs belles mercedes! Un peu comme si au Moyen-Age on se serait étonné de voir les roulottes des bohémiens tirées par un cheval au lieu d'un mulet.
Oubliés encore une fois, la bohème, Esmeralda, Carmen, Django Reinhart et les Gypsies Kings. On voudrait chasser les gitans du coeur de l'identité nationale, qu'on ne s'y prendrait pas autrement.
Comme dirait Carmen: France, prends garde à toi!
Quand on ne veut pas connaître c'est qu'on a dû naître con!