Nuits agitées à l’Elysée pour OSS118
Chers Amis,
A la suite de notre échec à la coupe du monde de rugby, j’ai été affecté à la garde du président pendant la nuit.
C’est une tâche très difficile car, depuis quelques temps, le président fait des cauchemars qui se terminent presque à chaque fois par un réveil en sursaut et des hurlements de terreur.
En général j’arrive en courant, l’arme à la main au cas où j’aurais à surprendre un dangereux terroriste. Heureusement, la seule terreur à laquelle je dois faire face, c’est celle que je lis sur le visage de notre bien-aimé président.
La dernière fois, il était en sueur, les yeux remplis d’une grande frayeur, prêt à donner des poings et des pieds contre des ennemis invisibles, il criait : « A moi la France ! Mort aux cons ! Vous ne m’aurez pas ! ». Je le réveillai et le serrai tout contre moi et une fois remis de son combat onirique, il se confia à moi.
- Cher Hubert, je suis un homme seul, abandonné de tous, je dois faire front aux ennemis de la France, y compris les français eux-mêmes. Et tous se sont entendus, tous ont comploté de vils desseins pour me faire trébucher et me frapper à terre, les lâches ! Rachida m’a dit que mes rêves sont à l’image de ma mission pour le pays. Titanesques !
Il fallait que je le rassure, que je créé chez lui un choc de confiance
- Vous êtes comme Alexandre le Grand, mon bien-aimé président : entourés de Cassandres et de généraux félons mais aussi de jeunes officiers fidèles issus de la diversité, vous avez enrôlé les forces vives de la nation à la conquête des nouveaux territoires de la réforme, vos victoires ont repoussé plus loin les frontières de la politique. Vous avez libéré de vastes contrées sauvages peuplées de barbares à gauche et rallié à votre bannière certains de leurs meilleurs officiers qui ont reconnu en vous le porteur d’un nouvel espoir pour une civilisation prospère que vous seul, pouvez incarner.
- Merci, Hubert, j’ai toujours su que je pouvais compter sur toi. Mais je fais toujours le même cauchemar et ça mine tous mes efforts.
- Dites le moi, mon président, ça vous soulagera.
Il me regarda droit dans les yeux, une lueur inquiète dans le regard…
- Ca commence toujours pareil, je marche dans un tunnel, je regarde l’heure à ma Rollex et je me dis : « je vais être en retard ». Je cours avec mes amis CRS, je pense à Cécilia que j’aime tant et quand j’arrive, on me dit qu’elle m’a quitté. Khadafi apparaît un bref instant et me serre la main en répétant sans arrêt : « Merci ! ». BHL me montre la direction de Washington, j’y aborde avec le yacht de Bolloré et me retrouve avec la famille Bush qui se fout de ma gueule me demandant toutes les cinq minutes : »Jacky euh pardon, Cécilia angine blanche, tout ça tout ça ha ha ha ha ! ». C’est alors que je vois le visage de P’tit Louis qui me dit : « Papa n’est pas là, papa n’est pas là ! » Je lui hurle : « Mais je suis là, je suis ton père ». Il me répond : « Nooon ! Prouve-le, Papa n’est pas si petit, fais un test ADN ! ». Des infirmières bulgares m’attrapent, m’embrassent, elles veulent voir Cécilia. Comme elle n’est pas là, elles lèvent leurs seringues et veulent me faire un prélèvement ADN. Une journaliste de CBS m’agresse et me dit : « Mister Président, sans Cecilia, vous ne serez jamais Kennedy ! »
J’étais sidéré par ce qu’avait subi cet homme si bon, si fort. Des forces occultes travaillaient au sein de son psychisme pour le rendre fou. Peut-être l'avait-on drogué à son insu? Ses cauchemars étaient comme des appels au secours.
- C’est terrible, de quoi perdre la raison mais je ne vous abandonnerai pas, président, continuez à tout me dire.
- Merci, mon brave Hubert, toi au moins tu comprends ! Voilà Je poursuis ma course dans le tunnel et je me retrouve nez à nez avec Juju le pêcheur qui me crie : « Monsieur 140%, je vais te mettre un coup de boule ! ». Je reprend mon jogging avec mes amis CRS et j’aperçois Fillon qui me double dans un char d’assaut en disant : « c’est la faillite, on va tous crever ! ». C’est alors qu’un cheminot descend de son TGV et me tend sa fiche de salaire sous le nez, l’air menaçant. Rachida me tire par le bras, elle pleure à chaudes larmes car des magistrats et des avocats en colère lui ont déchiré son dernier ensemble Dior à 1800 € pour les 320 tribunaux et conseils de prud’hommes qu’elle a fermés. Je reviens sur mes pas. Au loin, Ingrid Bétancourt fait des signes à Chavez qui ne voit rien. Des policiers surgissent, se lancent à ma poursuite la matraque levée, me doublent et plaquent au sol un enfant immigré. Dans un coin, il y a Kouchner qui fait une crise de nerfs, des notables du CRIF le soutiennent par les épaules. Retrouvant sa grandiloquence, il me propose d’attaquer l’Iran immédiatement et de bombarder le Hezbollah. Au bout d’un couloir, des musulmans barbus me font face, je me retourne vers Barroso et je lui dis :« mais il y a trop de musulmans en Europe, ça devient dangereux pour les moutons de France. » Jack Lang me tape sur l’épaule : « Dessine-moi en mouton ! ». Je m’enfuis et bouscule Besson, un poignard plein du sang de Ségolène Royal à la main. Dans un couloir, des hordes de noirs déchaînés chantent en me faisant des signes hostiles : « Nous sommes les africains, les africains qui venons de loin… ». C’est là en général, que je me réveille.
Il poussa un profond soupir et guetta ma réaction.
- Président, c’est trop horrible, je veillerai sur vous.
- Mon brave Hubert, la seule chose qui me permettrait de retrouver le sommeil, ça serait que tu me dises que tout ça n’est jamais arrivé, que ces rêves ne reflètent en rien la réalité. Dis le moi, Hubert, dis-le moi !
- Euh ! Mon président, je dois vous le dire, je vous dois la vérité. Tout ça ne s’est pas réellement passé ; c’est dans votre tête, enfin…pas tout et pas comme ça. Vos rêves sont comme un excès de caricatures. Vous voyez, alors, comme vous l’avez si subtilement dit : il vaut mieux un excès de caricature que pas de caricature du tout.
Palais de l’Elysée, le 23 novembre 2007