La société antillaise a évolué et personne ne l'a vu

Publié le par Milton Dassier

Jego revient en Guadeloupe et s'arrêtera en Martinique sans rien de la part du gouvernement pour les salaires. En effet, le gouvernement vient de se rendre compte que s'il cède aux demandes du patronnat antillais en réduisant les charges sociales et la taxe professionnelle, il ferait dans l'assistanat car au bout du compte, c'est l'état français qui prendrait indirectement en charge l'augmentation.

Cela pourrait donner des ailes à ceux qui voudraient la même chose en France continentale, cela mécontenterait l'électorat UMP car cela donnerait une impression de faiblesse et même un reniement des idées de Sarkozy.


En fait, le gouvernement s'est piégé tout seul. Il s'était dit que le système Chirac de relations clientélistes et de bonne camaraderie avec les populations tout en favorisant les nantis des Antilles au nom d'une solidarité oligarchique, pouvait perdurer.


C'était sans compter sur le peuple qui, petit à petit, à force de voyages, de télé satellitaire, d'internet a eu le temps d'observer et "d'étudier" en profondeur les mentalités métropolitaines notamment celles des politiques.

Vues initialement comme naïves, les populations des Antilles ont changé sans qu'on s'en aperçoive, sans que cela fasse de vagues. Elles se sont fondues en apparence dans le moule français et de façon souvent magistrale sans renier leurs racines multiples et en développant une identité métisse, créole spécifique.

Facilement divisée auparavant, souvent honteuse de ses propres valeurs, la société antillaise est en train de digérer l'esclavage, le racisme et le colonialisme y compris dans leurs aspects économiques, sociaux et politiques comme on le voit aujourd'hui. Les mouvements que l'on voit aux Antilles sont à voir comme la libération salutaire d'une longue constipation.


Les revendications sont simples et de bon sens. Elles sont légalistes et elles ont la légitimité de la consitution. Pas de trouble à l'ordre public, pas de revendications politiques sur le statut institutionnel (indépendance, autonomie...etc). Elles tournent toutes autour de l'idée de justice ou de réparations d'injustices économiques et sociales.


L'argumentation préparée par les leaders syndicaux n'est même pas contestée, ni par le patronnat ni par le gouvernement.

L'échec de l'état français et du système mis en place sans aucun changement notable depuis les lois de décentralisation de 1983 est inconstestable. Les problèmes soulevés par les antillais sont multiples et démontrent que l'assistanat dénoncé par certains reflète une volonté politique d'abrutissement pour permettre à des monopoles de faire des profits faciles. Monopoles, marchés captifs et abus de position dominante sur le dos du contribuable français dans son ensemble et des consommateurs antillais. Car les monopoles ne sont pas l'apanage des seuls békés.


Je vois dans vos yeux que vous voulez des exemples...

 

Quand une compagnie aérienne nationale propose le vol Paris-New-York (5000km) à 500€, elle le fait d'autant plus facilement qu'elle propose dans le même temps Paris- Pointe-à-Pitre (6500km) à 1000€ avec l'assurance que les antillais, y compris ceux vivant en métropole, ayant besoin de voyager ne pourront pas faire autrement...


Même chose avec le fret maritîme. La CGM peut faire des prix plus bas à l'international parce qu'elle facture un maximum ses prestations aux Antilles.

France-Télécom n'est pas en reste avec le monopole sur les lignes téléphoniques qui limite les offres concurrentielles sur la téléphonie et l'internet. Un abonnement internet en haut-débit à 520kbs est à 47€ mensuel et cela sans téléphone, sans bouquet TV.

Les banques, les assurances, les consommables de toute sorte voient leurs tarifs supérieurs de 50 à 500% par rapport à ceux de la métropole.


La vérité est donc évidente : le système est pervers.

Les Départements d'Outre-mer ont été érigés non pas en paradis fiscaux mais en paradis commerciaux avec une même démission de l'état. Depuis longtemps, l'état détourne les yeux et cautionne ainsi des pratiques commerciales qui profitent à quelques-uns que ce soit des entreprises nationales ou multinationales ou des entreprises békés, c'est à dire des amis qui reçoivent même légion d'honneur et "autre bon point"; qui ont parfois une ligne directe avec l'Elysée, Matignon et l'UMP quand ils n'accueillent pas leur généreux "parrains" parisiens en vacances privées chez eux.

Jusqu'ici, un équilibre avait été trouvé pour que les populations se sentent assez bien loties dans ce système. Elles consommaient, dépensaient l'argent de l'assistanat, de la défiscalisation et des aides aux entreprises en ayant l'illusion d'une citoyenneté et du mode de vie à l'occidentale. Elles se bouchaient les oreilles quand les profiteurs du système avaient l'outrecuidance de les critiquer pour ce qui ressemblait à de l'insouciance en les appelant "danseuses de la France". Les solidarités internes et locales, familiales et sociales compensaient la misère d'une partie de la population, du moins les rendaient moins voyantes.


Et puis, petit à petit, le système n'a pas pu digérer la course aux profits voulue par l'économie néolibérale sans régulation, sans encadrement de l'état. Les positions dominantes, les monopoles sont devenus de plus en plus gourmands encouragés par la mondialisation des profits.


C'est donc en toute connaissance du système et de ceux qui le servent que les peuples des Antilles sont en lutte et sont en train de rafler la mise.

Publié dans anticolonialisme

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O
Vous en référez-vous à un système temps pluridimensionnel, affrontant les choses à faire, toutes de front et non pas de façon linéaire ? ... ? En est-ce un exemple ? <br /> <br /> [->http://tvdieudo.info/upc/article.php?id_article=62]<br /> <br /> Il me semble à vous lire que oui ... encore que... mais pourtant si.<br /> <br /> ???
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M
<br /> <br /> Vous savez le tout ne se réduit pas à la somme de ses parties.. Il y a donc des processus anthropologiques et sociaux qui échappent aux approches historiques classiques.<br /> <br /> <br /> <br />