L’UMP et les races : dans la droite ligne de De Gaulle en 1958
Je n’ai jamais entendu parler autant de race en France qu’en ce moment.
Tout le monde y va de son analyse, de son commentaire et dés lors qu’on aborde certains sujets, le mot race ou ce qui s’y rattache surgit dans le discours comme un vieux fantôme dans le cachot sombre et humide d'un vieux château en ruines.
Problèmes de cohabitation en milieu urbain, d’immigration, d’intégration, diversité démographique, représentation politique, monde globalisé, tous ces sujets amènent certaines personnes à parler de race.
On l’a vu dernièrement avec la nomination de Mr Pierre N’Gahane comme préfet et avec les déclarations de Messieurs Brice Hortefeux, Patrick Ollier, Eric Zemmour, le mot race fascine autant qu’il effraie. Il fascine parce qu’il correspond aux classifications pseudo scientifiques en vigueur au 18ème siècle, au 19ème siècle et dans la première moitié du 20ème, époque de l’apogée des empires coloniaux. A ces époques, même des gens très estimables par leur combat pour le progrès des idées, se sont fait piéger : Voltaire, Kant, Tocqueville, Victor Hugo, Jules Ferry, Clémenceau. Et aujourd'hui, même la médiatrice du Monde se fait piéger. Mais là, c'est lié à une incompréhension totale de ce que représente l'élection d'Obama. S'il est métis et se montre compréhensif vis-à-vis des gens peuvent être racistes comme il l'a dit dans son discours de Philadelphie, alors on pourrait s'autoriser à mettre les pieds dans le plat des races quitte à s'éclabousser sa propre bêtise?
C’était tellement pratique pour certains de se regarder le nombril et d’admirer sa blancheur identique à celle qui réussissait dans le sang, la conquête du monde entier. Petit à petit, cette fascination de l’esprit humain a laissé sa place à la fascisation rampante des esprits. C’est en cela que les colonisations européennes ont préparé le terrain idéologique au fascisme. A partir du moment, où on classait les gens sur des critères raciaux, on pouvait tout se permettre, y compris d’éliminer des groupes politiques, des populations sur critère ethnique, Il suffisait de parler de parti de l’étranger, de complot contre la nation, super commode ! On est allé jusqu’à dire pendant les deux guerres mondiales que les allemands et leurs alliés n’étaient pas des hommes, qu’ils pissaient par les pieds, qu’ils étaient de mèche avec le diable.
Et ça repart au 21ème siècle de façon plus édulcorée dans des propos qui trahissent non pas une haine ou un mépris mais une méfiance et un rejet. Edulcorée car objet d’un retour du refoulé. Un régal pour les psychanlystes! Après la chute du nazisme et des fascismes européens, puis après la décolonisation et les mouvements de jeunesse des sixties, après mai 68, les conceptions racistes ont été interdites dans le discours politique et public. Malgré cela, les théoriciens des races ont continué à sévir au sein des institutions scientifiques, politiques culturelles, jusque dans les années 70. Et une belle photo honorant Félix Eboué, ce grand homme guyanais, résistant de la première heure, en Afrique n'y changea pas grand chose.
Tout ce délire autour du concept de race est hérité des recherches au 18ème et au 19ème siècle sur les espèces animales et végétales auxquelles se sont ajoutées des considérations ethnocentristes et nationalistes.
C’est bien ce cocktail détonnant qu’on commence à retrouver dans le discours dit décomplexé d’aujourd’hui.
On parle d’identité nationale comme réponse rassurante à cette mondialisation qui étoufferait les populations en suscitant un sentiment d’insécurité culturelle, on parle de suprématie occidentale à préserver face aux menaces extérieures, de peuple élu pour certains et de peuples n’étant pas entrés dans la civilisation voire maudits pour d’autres (africains, haïtiens, palestiniens, tibétains..etc). Un cap se franchit aujourd’hui comme si l’élection d’Obama suscitait en même temps fascination, bonheur et frayeur. Un président US noir, ça remet en cause tout ce que des générations ont appris à l’école et à l’université dans l’ancien temps. Même de grands auteurs et des personnalités admirés, vénérés et étudiés sont ainsi remis en cause, pas sur la totalité de leur œuvre mais sur une partie. En tous cas, ça les désacralise.
Que pèsent les paroles racistes du Général de Gaulle face à l’élection d’Obama ?
”C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Il montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne.”
Ici on est dans la mentalité sarkoziste et UMP partagée par une majorité de français, celle qui a voté en 2007 et applaudit régulièrement à la nomination de quelques non blancs à des places honorifiques. Dés lors on peut affirmer sans être contredit que, dans le domaine de l’ouverture à l’autre et de la prise en compte de sa diversité, la France de Sarkozy est bien une France qui régresse de 40 ans.
Mais il y a pire de la part de Mongénéral ::
«…. Les Arabes, ce n'est rien. Jamais on n'a vu des Arabes construire des routes, des barrages, des usines. Après tout peut-être n'ont-ils pas besoin de routes, de barrages, d'usines. Ce sont d'habiles politiques. Ils sont habiles comme des mendiants.
Bien entendu, ces déclarations étaient liées à un contexte mais les écrits se transmettent comme des vérités intemporelles. La dernière déclaration de De Gaulle ressemble à du De Villiers, non ?…Alors, quand on voit l’importance d’un homme comme De Gaulle et l’empreinte qu’il a gravée au fer rouge dans la culture politique française à travers ceux qui l’ont connu, admiré et fait leur son projet pour la France, on se dit qu’on est encore loin d’une France politique métissée reflétant la diversité de sa population.
N'oublions pas que côté UMP, Sarkozy fut l'élève de Pasqua et Balladur, eux-mêmes déjà aux affaires sous De Gaulle.
Les hommes restent et les mentalités ne changent pas...