Kemi Seba victime expiatoire du sarkozisme triomphant ?
J’ai connu Kémi Seba et sa démarche au cours de l’année 2005 en pleine attaque contre la mémoire des descendants d’esclaves. C’est à cette époque qu’on a introduit le concept de concurrence victimaire. Nous étions au moment où les descendants d’esclaves, les indigènes de la république dénonçaient les discriminations, le racisme ambiant dans la société française et l’oubli de la mémoire de leurs ancêtres qui avaient pourtant payé un lourd tribut à la nation française soit comme victime de la colonisation et de l’esclavage, soit comme combattants au sein de l’armée française pendant les deux dernières guerres mondiales.
L’oubli de la mémoire des esclaves, cela avait été l’absence de commémoration d’envergure à l’occasion des 150 ans de l’abolition de l’esclavage en 1998 ou lors de l’année de l’ONU sur l’esclavage et la traite négrière en 2001.
Je ne sais pas pourquoi mais il semble bien qu’en 2001, les autorités françaises aient délibérément occulté tout hommage à l’abolition de l’esclavage et des traites négrières sous l’égide de l’ONU. Et tant pis pour les antillais et les réunionnais !
La cause de ce silence : la conférence de Durban sur le racisme avec la crainte de voir des demandes de réparations et de repentance, ainsi qu’une remise en cause du projet sioniste assimilé par beaucoup à une colonisation et un régime d’apartheid. Une précision, la conférence de Durban a eu lieu un mois avant les attentats du 11 septembre...
C’est pour cette raison que Dieudonné mit les pieds dans le plat en se demandant pourquoi l’agenda républicain faisait une très large place à la shoah et sa commémoration en 2006 alors que rien n’avait été fait pour les commémorations sur l’esclavage quelques années auparavant. Il le fit fort maladroitement en parlant de « pornographie mémorielle » à propos des commémorations de l’holocauste de 2006. Il était déjà largement dans le collimateur des organisations juives proches du Likoud et de l’extrême droite israélienne après son sketch lors de l'émission de Fogiel, où il vilipendait avec audace les colons israéliens des territoires occupés.
Kemi Seba semble avoir repris le flambeau de Dieudonné en apparence seulement. Le problème est que sous sa sincérité à vouloir défendre le peuple noir, à vouloir le réunir à sa source africaine, il prône une doctrine comparable sous bien des aspects au sionisme qu’il exècre : retour aux sources géographiques et culturelles de la diaspora noire, résurgence purificatrice de la religion des anciens, celle des Egyptiens, zélotisme se muant en une « interdiction » aux non noirs d’adhérer à ces idées. Son approche a évolué par la suite, c'est une bonne chose.
Bien entendu, il ne s’agit en aucun cas pour Kemi Seba de coloniser une terre, d’en exproprier ses habitants, d’en proclamer le caractère exclusivement kémite et d’être en guerre permanente contre toute sorte d’ennemis. Mais sa virulence des débuts, sa réactivité et des maladresses en ont fait une sorte de menace. Du moins, ses détracteurs n’attendaient que cela ! Les malheurs de Kemi Seba, les injustices qu’il subit arrangent certaines personnes : les organisations pro-israéliennes de droite et d’extrême droite ; des organisations francofrançaises qui défendent un racisme de « salut public » (chacun chez soi !), enfin les tenants du nouvel ordre sarkoziste qui ont besoin de fauteurs de trouble pour justifier leurs lois liberticides et sécuritaires.
Je suis résolument contre toute condamnation de Kemi Seba car il n’a pas attenté à l’ordre public et ses déclarations sont soit maladroites, soit déformées comme pour Dieudonné. De la même façon, Kemi Seba est tombé dans un piège en répondant à une provocation préméditée par les milices de LDJ et du Betar, les autorités en étaient informées puisque toute l'évolution avait été publiée sur le net. Pour moi, le combat de Kemi Seba est noble et courageux et je n’aurais qu’une chose à lui dire. Le sionisme rentre aujourd’hui dans une idéologie plus large faite de messianisme politique, de militarisme et d’européocentrisme.
Le messianisme politique c’est ce qui fait que les USA s’imaginent être une nouvelle Terre Promise et qu’ils soutiennent Israël en tant que Terre Promise originelle biblique.
Le militarisme c’est la guerre permanente que mènent les USA contre un ennemi, une menace. Cela stimule leur économie et leur permet de dominer le monde. Israël soutient inconditionnellement cette prétention hégémonique américaine qui le protège.
L’européocentrisme, c’est cette tendance à voir dans l’Europe, le creuset des idées de démocratie et de droits de l’homme en ignorant les horreurs commises parfois au nom de ces beaux principes, en snobant le monde non européen à l’exception des pays largement peuplés d’européens : Amérique du Nord, Australie, Israël ..etc. En gros, les peuples issus de l’Europe prétendent être une sorte de référence historique, culturelle et démocratique pour le reste du monde.
Le monde évolue à grande vitesse et, ne se baser que sur l’idéologie sioniste pour se définir un objet de combat est contre-productif.
Bien évidemment, ça peut faire débat, alors à vos claviers.